Vita da fotografo

The Passenger | La Havana Cuba

  • date
  • 1 December 2018

|FR| Le Passager | Photographie et texte de Nicolas Pascarel

En 1996 j’étais jeune et l’Europe m’ennuyait déjà alors j’ai décidé d’aller là bas, voir ce qui se passait, je sentais que je pouvais vivre en quelque sorte. Vivre quoi, je ne le savais pas mais c’était mon idée : changer. Me changer.
Je suis arrivé tout là bas, derrière l’océan et c’était comme une image arrêtée, comme lorsqu’on appuie sur le bouton pause, un arrêt dans le temps. C’est ça qui m’a fait réfléchir et étrangement c’est justement ça qui m’a fait avancer. Je me sentais comment dire « nouveau ». Les gens marchent, mangent, travaillent, prennent le bus, s’amusent et pleurent mais le tout au ralenti,  comme dans un boléro, comme si le futur n’existait pas. Tout le contraire de ce que je voyais en Europe ou les gens ne pensent qu’au futur, leur propre futur : s’ils vivront mieux demain, un meilleur amour, une meilleure maison, une plus belle voiture, de meilleures vacances, une vie plus longue, un meilleur boulot ..Moi je n’ai jamais pensé au futur et encore moins à toute ces choses, ceci ne m’intéresse pas, je vis et je ne peux m’arrêter. Lorsque je m’arrêterais, tout sera fini. Définitivement. Alors je voulais échapper à tout ceci. Et je suis parti, sans trop réfléchir.
A La Havane j’ai senti le non futur comme un film qui ne se déroule pas à la bonne vitesse, en mode lent. Ceci a changé ma vision du monde, ma façon de photographier, de regarder. Ce fut un tournant pour moi. Bizarrement je me suis sentie vivre, vivre vraiment pour la première fois, complètement libre. Ça peut paraître absurde vu le système politique en place mais j’ai senti une liberté que je ne connaissais pas avant, loin de tout et de tous. J’ai aimé.
Et puis les années sont passées et j’ai continué cette histoire d’amour entre moi et la ville, lentement, à sa façon. Lorsque j’ai fais ma deuxième expo à la Fototeca de Cuba en 2001, c’était peut être une façon d’en finir, de dire tout haut ; j’ai vu, j’ai vécu et voici le résultat. Je pensais en avoir terminé avec La Havane, à tout jamais. Le point final à mon évolution pour ne pas dire révolution. Entre 1996 et 2001 beaucoup de choses avait changé en moi, tant sur le point de vue professionnel  que personnel et je pensais que jamais plus je ne reviendrais, que c’était définitivement fini.
Je me suis trompé. J’ai mis 10 ans pour y revenir, comme ça, sans trop réfléchir.
Ça m’a fait bizarre. Tout était resté pratiquement pareil et moi j’avançais sans recul dans l’âge, dans le temps. Le retour fut très dur, brutal, parfois ennuyant pour ne pas dire décevant. Et puis il y a eu d’autres voyages qui ont suivis, toujours avec une sorte de malaise. Je n’arrivais plus à rentrer dans la ville, je voyais ma belle et elle ne me faisait plus d’effet, je ne la désirais plus mais je l’aimais encore. Ce sont des choses qui arrivent avec l’amour. Des choses terribles. Oui vraiment terrible.
Et puis il y a eu la lumière. Certains appellent ça la maturité mais je n’aime pas ce mot. Pour moi tout est amour et de nouveau j’ai aimé, désiré. Oui comme ça au premier soir d’un jour de novembre 2012. J’ai senti tout de suite à peine sortie de l’avion, mon cœur et mon esprit renouer avec mon amour presque éternel. Ce fut magique tout comme la lumière du jour qui entre dans la chambre au petit matin. Lorsque je suis arrivé, j’ai senti de nouveau l’envie, l’envie de vivre, de raconter avec mon outil qui est la photo. Alors j’ai commencé The Passenger, le passager.
Le passager était une évidence pour ne pas dire une délivrance. Le passager raconte tout ce que j’ai toujours voulu raconter, c’est à dire pas grand chose, il raconte le tourbillon de ma vie et c’est pas une mince affaire ! Le tout enfin dans une même histoire. Il m’a paru nécessaire d’éliminer dans mes photos et pour la première fois, les gens, les portraits, les ambiances de rues….moi qui aime tant l’Humanité mais ceci était nécessaire pour matransformation. C’est le travail qui ressemble le plus à ce que je suis aujourd’hui, le plus abouti dans ma vie de photographe.
Les images parfois brisent le vent, elles le caressent pour le rompre à jamais, le tout à la lumière du coucher du soleil, entre chien et loup au moment même ou se mêle sans cesse cette tempête qui hante mes nuits. Nuits d’amour et nuits maudites, seul.

|IT| Il Passeggero | Fotografie e testo di Nicolas Pascarel

Nel 1996 ero giovane e l’Europa già mi annoiava. Decisi allora di andare laggiù, vedere cosa succedeva, sentivo di poter vivere. Vivere cosa non lo sapevo ma questa era la mia idea : cambiare. Cambiarmi.
Sono arrivato laggiù, oltre l’oceano, ed è stato un fermo immagine, come se qualcuno avesse premuto il tasto pausa, un tempo sospeso. É stato questo a farmi riflettere e, stranamente, a fami avanzare. Mi sentivo, come dire, « nuovo ». Le persone camminavano, mangiavano, lavoravano, prendevano l’autobus, si divertivano e piangevano, tutto al rallentatore, come in un bolero, come se il futuro non esistesse.
Proprio il contrario di quello che vedevo in Europa, dove le persone non pensano che al futuro, al proprio futuro : se domani avranno una vita migliore, un amore più forte, una casa più grande, una macchina più bella, delle vacanze più esotiche, una vita più lunga, un lavoro più pagato… Io, io non ho mai pensato al futuro e ancor meno a tutte queste cose, non mi interessa, vivo e non posso fermarmi. Quando mi fermerò, sarà tutto finito. Per sempre. Perciò volevo scappare da tutto questo. E allora sono partito, senza pensarci troppo.
A L’Avana ho sentito il non-futuro, come un film che non gira alla giusta velocità, ma in modo lento. É stato questo a cambiare la mia visione del mondo, il mio modo di fotografare, di guardare. Una svolta per me. Stranamente mi sono sentito vivere, vivere veramente per la prima volta, completamente libero. Potrebbe sembrare assurdo in quel sistema politico, ma ho sentito una libertà che mai avevo sperimentato prima, lontano da tutto e da tutti. L’ho amata.
E poi gli anni sono passati e ho portato avanti questa storia d’amore tra me e la città, lentamente, a modo suo. Quando ho realizzato la mia seconda esposizione alla Fototeca di Cuba nel 2001, quella poteva essere l’occasione per concludere tutto, per dire ad alta voce: ho visto, ho vissuto ed ecco il risultato. Pensavo di aver chiuso con L’Avana, per sempre. Il punto di arrivo della mia evoluzione, per non dire Rivoluzione. Tra il 1996 e il 2001 molte cose sono cambiate in me, nella vita e nella professione, pensavo che non sarei più tornato, che fosse davvero finita.
Mi sono sbagliato. Mi ci sono voluti 10 anni per tornare, anche stavolta senza pensarci troppo. Strana sensazione. Tutto era rimasto uguale, immobile, mentre io avanzavo senza sosta nell’età, nel tempo. Il ritorno è stato molto duro, brutale, persino noioso, per non dire deludente. Sono seguiti altri viaggi, sempre con una sorta di malessere. Non riuscivo più a entrare nella città, vedevo la mia bella e non mi faceva nessun effetto, non la desideravo più ma la amavo ancora. Sono cose che succedono con l’amore. Cose terribili. Sì, veramente terribili.
E poi è arrivata la luce. Alcuni la chiamano maturità, ma a me non mi piace questa parola. Per me tutto è amore, e di nuovo ho amato, desiderato. Nella prima sera di un giorno di novembre 2012. Ho risentito tutto appena fuori dall’aereo, il mio cuore, il mio spirito riconciliati con il mio amore per la città, eterno. É stato magico, proprio come la luce del giorno che entra nella stanza a prima mattina. Arrivato, ho sentito di nuovo la voglia, la voglia di vivere, di raccontare con il mio strumento, la fotografia. Così ho cominciato Il passeggero.
Il passeggero era una necessità, un sollievo. Il passeggero racconta tutto quello che ho sempre voluto raccontare, cioè ben poco. Racconta il tourbillon della mia vita, mica facile! Tutto dentro una stessa storia. Per la prima volta era necessario togliere dalle mie foto le persone, i ritratti, le atmosfere della strada…insolito per me che amo tanto l’Umanità, ma essenziale per la mia trasformazione. É il lavoro che più somiglia a quello che sono oggi, quello che meglio incarna la mia vita da fotografo.
Le immagini a volte spezzano il vento, lo accarezzano per straziarlo all’infinito, tutto al calar del sole, nel blu notte, nel momento esatto in cui prende forma quella tempesta che agita le mie notti. Notti d’amore e notti maledette, solo.

|DE| Le Passager | Photography and text by Nicolas Pascarel

Im Jahre 1996 war ich jung und Europa langweilte mich bereits, also entschied ich, dorthin zu gehen, um zu sehen was passiert. Ich spürte, dass ich irgendwie leben konnte. Was zu leben, wusste ich nicht, aber meine Idee war: sich verändern. Mich verändern.
Ich kam da unten an, hinter dem Ozean; und es war wie ein angehaltenes Bild, als ob man die Stopptaste drückt und die Zeit stehen bleibt. Das brachte mich zum Nachdenken und seltsamerweise war es das, was mich weitermachen ließ. Ich fühlte mich, wie soll ich sagen, “neu”. Die Leute gehen, essen, arbeiten, nehmen den Bus, vergnügen sich und weinen, aber alles in Zeitlupe, wie in einem Bolero, als ob die Zukunft nicht existierte. Das genaue Gegenteil von dem, was ich in Europa sah, wo Menschen nur an die Zukunft denken, an ihre eigene Zukunft: ob sie morgen besser leben werden, ob sie eine bessere Liebe, ein besseres Haus, ein schöneres Auto, einen besseren Urlaub, ein längeres Leben, einen besseren Job, haben werden. Ich habe nie an die Zukunft gedacht und noch weniger an alle diese Dinge, das interessiert mich nicht, ich lebe und ich kann nicht anhalten. Wenn ich anhalte, wird alles verloren sein. Für immer. Also bin ich vor all dem geflohen. Und ich bin abgereist, ohne zu viel nachzudenken.
In Havanna spürte ich die Nicht-Zukunft, wie ein Film, der nicht mit der richtigen Geschwindigkeit abläuft, im langsamen Modus. Das hat meine Sicht auf die Welt geändert, meine Art zu fotografieren, zu schauen. Es war ein Wendepunkt für mich. Seltsamerweise fühlte ich mich leben, wirklich leben, zum ersten Mal, völlig frei. Das mag angesichts des politischen Systems dort absurd erscheinen, aber ich fühlte eine Freiheit, die ich vorher nie erfahren hatte, weit weg von allem und von allen. Ich liebte sie.
Dann vergingen die Jahre und diese Liebegeschichte zwischen mir und der Stadt ging weiter, langsam, auf ihre Weise. Meine zweite Ausstellung in der Fototeca de Cuba 2001 hätte die Gelegenheit sein können, um Schluss zu machen, um laut zu sagen: ich habe gesehen, ich habe gelebt und hier ist das Ergebnis. Ich dachte, ich wäre definitiv fertig mit Havanna. Der Endpunkt meiner Entwicklung, um nicht zu sagen Revolution. Zwischen 1996 und 2001 haben sich viele Dinge in mir verändert, sowohl beruflich als auch privat; ich dachte, daß ich nie zurückkehren würde, daß definitiv Schluss sei.
Ich habe mich geirrt. Ich habe 10 Jahre gebraucht, um zurückzukommen, ohne viel nachzudenken. Es hat sich seltsam angefühlt. Alles war fast gleich geblieben und ich ging ohne Halt weiter – im Alter, in der Zeit. Die Rückkehr war sehr hart, brutal, sogar langweilig, um nicht zu sagen enttäuschend. Und dann folgten noch andere Reisen dorthin, immer mit einer Art Malaise. Ich schaffte es nicht mehr, in die Stadt einzudringen, ich sah meine Schöne und sie übte keinerlei Wirkung mehr auf mich aus, ich begehrte sie nicht mehr, aber ich liebte sie noch. Das sind Dinge, die mit Liebe geschehen. Schreckliche Dinge, Ja, wirklich schrecklich.
Und dann war da das Licht. Manche nennen es Reife, aber ich mag dieses Wort nicht. Für mich ist alles Liebe und ich habe wieder geliebt, begehrt. Es geschah zum ersten Mal am Abend eines Novembertages 2012. Ich war kaum aus dem Flugzeug ausgestiegen, als ich mein Herz und meinen Geist durch meine fast ewige Liebe erneuert fühlte. Es war zauberhaft, wie das Tageslicht, das am frühen Morgen ins Zimmer fällt. Sobald ich angekommen war, fühlte ich wieder das Begehren, die Lust zu leben, mit meinem Mittel,welches die Photographie ist, zu erzählen. Also ich habe ich “Le Passager”, der Passagier, begonnen.
“Le Passager” war eine Notwendigkeit, fast eine Befreiung geworden. Er erzählt alles, was ich schon immer erzählen wollte, das heißt ziemlich wenig, er erzählt den Wirbel meines Lebens und das ist keine leichte Aufgabe! Alles in einer einzigen Geschichte. Es schien mir notwendig, zum ersten Mal aus meinen Fotos die Menschen, die Portraits, die Straßenatmosphäre herauszunehmen… gerade ich, der ich die Menschheit so sehr liebe, aber diese Transformation war notwendig. Es ist die Arbeit, die am meisten dem ähnelt, was ich heute bin, das, was am besten mein Leben als Photograph erzählt. Die Bilder zerbrechen manchmal den Wind, sie streicheln ihn, um ihn in die Unendlichkeit zu zerbrechen, zu Sonnenuntergang, genau in dem Moment, in dem der Sturm, der meine Nächte heimsucht, Gestalt annimmt. Nächte der Liebe und verdammte Nächte, allein.



© Nicolas Pascarel 2017